Anesthésie--Les Bases du Monitoring
World Small Animal Veterinary Association World Congress Proceedings, 2010
Yves P.S. Moens, Dr.med.vet., Dr habil., PhD, DECVAA

Lire la traduction anglaise: Essentials of Anaesthetic Monitoring

Introduction

Le meilleur moyen de faire du monitorage en pratique vétérinaire est de mandater une personne entièrement dédiée à cette tâche et qui le fait au moins à l'aide de l'examen clinique. Cette surveillance peut être assistée par l'utilisation de divers appareils qui mesurent les paramètres physiologiques importants. De nos jours ces moniteurs sont de plus en plus compacts, de prix abordable et adaptés aux besoins vétérinaires. Ils mesurent et surveillent soit un seul, soit plusieurs paramètres physiologiques en même temps (moniteurs combinés). Cette dernière option est pratique mais limite la possibilité de faire du monitorage sur deux animaux simultanément.

Une combinaison excellente qui permet le monitorage dans maintes circonstances y compris des situations compliquées, est le monitorage de l'électrocardiogramme, de la saturation de l'hémoglobine dans le sang artériel (oxymétrie pulsée), de la concentration (ou pression) du CO2 dans le gaz respiratoire (capnométrie), de la pression sanguine et de la température corporelle. La mesure de la concentration d'oxygène et de la concentration de l'anesthésique gazeux est souvent en option. Quand au choix à faire parmi les différents paramètres du monitorage il dépendra des préférences personnelles: le type d'animal, la technique anesthésique, la chirurgie, et du budget ! L'analyse des gaz respiratoires n'est pas fiable si le patient n'est pas intubé. La mesure de la concentration d'O2 inspiré est moins nécessaire si l'oxymétrie pulsée est utilisée.

Differents Parametres A Surveiller

Le capnomètre mesure le CO2 en% (ou en pression partielle en mmHg) dans le gaz respiratoire et existe même en version miniaturisée. Une version avec affichage des courbes (capnogramme, capnographe) est conseillée. Le capnographe est considéré comme moniteur unique par le fait que sa mesure reflète l'interaction simultanée de trois phénomènes importants: le métabolisme, la circulation pulmonaire et la ventilation. De plus le bon fonctionnement de l'appareil anesthésique et du raccordement avec le patient est vérifié. L'appareil offre un moyen d'estimer le taux sanguin de CO2 (qui dépend de la ventilation) mais d'une façon non invasive et continuelle. Ainsi le capnographe est extrêmement valable pour régler les modalités de la ventilation artificielle mécanique. La capnographie offre la possibilité du dépistage rapide de l'arrêt cardiaque et peut servir comme indicateur de l'efficacité du massage cardiaque lors de la réanimation.

Les capnomètres sont disponibles en version "side stream" ou "mainstream". Chaque système a des avantages et inconvénients mais le mainstream s'avère plus précis lors du monitorage des petits patients aux volumes respiratoires réduits et fréquences respiratoires élevées. Le side stream souffre de problèmes de fuites lors de l'échantillonnage par aspiration continue.

Une ventilation normale (CO2 normal) ne garantit pas l'absence d'hypoxémie pendant l'anésthésie. Par contre une hypoventilation (CO2 élevé, hypercapnie) va de pair avec une bonne oxygénation si l'animal respire un gaz riche en O2. Le degré d´oxygénation peut être estimé en utilisant la relation entre la pression partielle d'O2 dans le sang artériel (PaO2) et la saturation de l'hémoglobine artérielle (SaO2). C'est ce rapport (courbe sigmoïde) que l'oxymétrie pulsée utilise pour le calcul de la saturation (SpO2). L'oxymétrie pulsée reflète l'efficacité du système cardio-pulmonaire et indique si le sang est suffisamment oxygéné (SpO2 >95%). Un appareil qui affiche les courbes photoplethysmographiqes associées est conseillé. L'incidence de fausses mesures est élevé en cas de mouvement de la sonde et en cas de vasoconstriction (choc, alpha2-agonistes) parce que le principe de mesure nécessite la détection de pulsations artériolaires. Les technologies récentes réussissent à diminuer ce genre d'artéfacts. L'oxymétrie de pouls affiche la fréquence cardiaque (version véto >250/min) et s'avère plus fiable qu'une mesure sur base de l'électrocardiogramme parce que l'oxymétrie pulsée se base sur la présence d'une onde vasculaire pulsatile périphérique réelle. La technique permet également la détection des troubles du rythme cardiaque. L'oxymétrie de pouls est compacte et contribue à la sécurité lors du transport de patients anesthésiés. Il est clair que le capnographe et l'oxymétrie pulsée offrent une information physiologique excellente de grande importance et complémentaire. A elles deux ces technologies permettent la détection rapide de >90% des situations dangereuses. L'ECG demeure indispensable pour le diagnostic différentiel des arythmies cardiaques et lors du diagnostic et traitement de l'arrêt cardiaque.

La mesure de la pression artérielle sanguine est un des paramètres physiologiques les plus importants dont l'anesthésiste dispose pour apprécier la fonction cardiovasculaire. La technique invasive cependant est souvent hors de portée du praticien tandis que la technique non invasive n'est pas toujours aussi fiable que souhaitée. Des améliorations techniques récentes (mesure oscillométrique à haute définition) sont prometteuses mais ne sont pas incorporées pour l'instant dans les moniteurs multi-paramétriques. Une option non invasive alternative--la méthode à ultrason Doppler--offre la possibilité de mesurer la pression systolique. Sa popularité est variable, cependant le rapport prix/possibilités est intéressant pour le praticien. Le Doppler rend possible d'apprécier également la fréquence cardiaque et d'une façon continue, audible, la contractilité du myocarde et la perfusion vasculaire (pratique pour des monitorages sur des exotiques).

La mesure de la température corporelle est souvent négligée. Surtout les plus petits patients subissent aisément une hypothermie peranesthésique prononcée avec des troubles cardiaques et un réveil prolongé comme conséquence. La mesure de la température dans l'oesophage est meilleure que la mesure rectale. Récemment la spirométrie et la mesure de la pression dans les voies aériennes figurent parmi les paramètres standard de certains moniteurs multi paramétriques. D'autres possibilités récentes comme la mesure de la profondeur de l'anesthésie par une technique spéciale BIS (bispectral analysis) attendent la validation en anesthésie vétérinaire.

Conclusions Pratiques

Quoiqu'il soit évident que l'achat (et l'emploi) d'un capnographe (anesthésie gazeuse) et d'un appareil d'oxymétrie de pouls (anesthésie parentérale) soit avantageux pour la pratique anesthésique de chaque praticien, beaucoup d'entres eux devront faire le monitorage sans ces appareils. La "présence" d'équipement électronique n'est pas suffisante et ne pourra jamais remplacer la surveillance clinique par une personne expérimentée. Il est extrêmement important de comprendre la signification des changements des paramètres monitorés et l'influence d'erreurs dans leur interprétation. La thèse que l'emploi de monitorage augmente la sûreté pendant l'anesthésie n'a pas encore été prouvée en anesthésie vétérinaire. Cependant récemment il a été démontré avec une étude multicentrique que le monitorage du pouls et l'emploi de l'oxymétrie pulsée peuvent diminuent la mortalité anesthésique chez le chat. Si le monitorage doit s'organiser dans des circonstances minimales, l'utilité de l'emploi de l'oesophagosthéthoscope demeure incontestée. Des mesures simples supplémentaires comme l'arrangement des draps chirurgicaux d'une manière telle que la tête et les muqueuses et la langue du patient restent visibles et accessibles, ont fait leur preuve. N'oublions pas qu'une partie de la mortalité survient lors de l'induction quand les diverses sondes du monitorage ne sont pas encore en place. De l'autre côté il est de plus en plus clair qu'une autre grande partie de la mortalité est située dans la phase de récupération souvent à cause d'un manque de surveillance physique et de monitoring dans ce stade de l'intervention.

References

1.  Brodbelt, et al.British Journal of Anaesthesia 2007; 99:617.

2.  Moens, Coppens. BSVA Manual of Canine and Feline Anaesthesia and Analgesia, 2007, 2nd Ed.

 

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Yves P.S. Moens, Dr. med. vet., Dr habil., PhD, DECVAA


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